samedi 19 novembre 2016

Tapeguahê poraitéke... Bienvenido... Bienvenue au pays Guarani

16, 17 et 18 novembre

Paroles au creux de mes mains , c'est le titre d'un recueil de poèmes de Ruben Bareiro Saunier, qui a donné  l'idée de ce post au long duquel des mots de poètes paraguayens illustrent le court passage de deux voyageurs pressés dans un pays souvent méconnu mais qui a su les séduire.


Tout a commencé dans le miroir

Dans la paume indifférente de l'eau
le nuage a simulé des îles...
 (Josefina Pla)


Étonnement devant la ville d'Encarnacion qui s'étend sur une presqu'île dessinée par le Parana et semble une station balnéaire en bordure de mer tellement le fleuve s'étale à cet endroit.



Plan urbain orthogonal surprenant pour une ville qui a fêté les 400 ans de sa fondation l'an dernier... mais ne présente pas de quartier historique. Il faut dire qu'elle a occupé d'abord l'autre rive (devenue d'ailleurs argentine depuis) et a été déplacée sur celle-ci.
Allure d'un "front de mer" spacieux et moderne, avec tous les éléments obligés : hôtels, restaurants, vélos en location, parcours santé......




...... plutôt désert quand on y passe, mais qui est parait-il très couru aux vacances par les Argentins pour ses plages de sable. 


Les habitants sont exceptionnellement gentils et serviables ;  de Yolande,  notre hôtesse du B&B "Casa da Y", au policier qui nous explique que l'aménagement touristique de l'esplanade n'a que sept ans et a remplacé une zone anciennement marécageuse, ou encore à l'employé du poste de lavage qui refait une beauté à nos machines......


Le soir, on entend la répétition d'une bateria  qui prépare le carnaval dont il paraît qu'il est l'un des plus animés du continent ; d'où la présence - incongrue en apparence - d'un sambodrome sur le "front de mer".






De l'autre côté du fleuve Parana, c'est Posadas, la ville argentine, reliée par un pont de belle allure sur lequel passe même un train.

En espérant que le passage de frontière soit plutôt formel ; est-ce préoccupant de n'avoir eu aucun tampon-visa lors du passage Brésil-Paraguay à Iguacu-Ciudad del Este ?

Réponse immédiate au moment de passer la police des frontières argentine : amende de 50$ chacun pour entrée clandestine !!! On fait amitié avec le policier comme français sympas et naïfs : 40€ d'amende "seulement " pour les deux... et sans le moindre reçu ; ce sera pour l'apéritif du poste......
Adios !

Manie des douanes, des contrôles, des interdits .

Les Portes
Un enfermement de portes
à droite et à gauche,
toujours à contretemps,
toujours un peu avant
ou un moment trop tard
jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'une, ...   
          (Josefina Pla)

Mais à travers le circuit des réductions jésuites, au Paraguay et en Argentine ou au Brésil, on passe à la recherche du peuple guarani dont l'adaptabilité et les compétences techniques auraient permis que s'organisent durablement ces structures sociales utopiques imaginées par les Jésuites.

Les Guaranis, encadrés et organisés par les missionnaires, quittent leur vie semi-nomade dans la forêt et bâtissent les missions, y vivent, y développent la pratique de l'imprimerie, la sculpture, la musique,  l'architecture. Ces "républiques jésuites" les mettent pour quelques années à l'abri des attaques espagnoles et portugaises en quête de main d'oeuvre servile.

Puis, les Jésuites sont expulsés et en quelques années les réductions périclitent et disparaissent, les Guaranis qui survivent repartent dans la forêt pour reprendre leur mode de vie, la nuit de l'histoire se referme sur eux.

150 ans d'essor puis la disparition, Frédéric II de Prusse vient de faire construire le château de Sanssouci à Postdam ; Versailles est le phare de l'Europe depuis plus d'un demi-siècle, dit-on.
Il leur reste l'espoir :

Se va la noche, larga, larga,
y brilla la clara luz del dia.
De pronto somos libres
y todos en nuestro pais
hablam alegres y cantam, 
celebrando este amanecer.
                                                   (Modesto Escobar Aquino)
Que s'en aille la longue longue nuit,
et que brille la clarté du jour !
Libres tout à coup,
rassemblés dans notre pays,
 nous parlons et chantons
pour célébrer cette Aurore. 

Il était possible de se laisser tenter par une visite aérienne et un circuit en limousine, mais le souci de la simplicité et la retenue l'ont emporté.

Vestiges marquants de ce moment historique à  Jesus de Tavarengue (Paraguay)...

(le regard au loin accompagne la méditation)


  
(originalité de la décoration des pilastres) 

 
(les yeux ouvrent partout de nouvelles perspectives)


... à Trinidade del Parana (Paraguay)...
(sur la chaire et les fonds baptismaux, les motifs classiques : évangélistes, feuillages)

  
(... mais aussi finesse des décors sculptés qui reprennent des éléments de la culture guarani...)
 
(... frise des anges musiciens)                        (...campanile)

... à San Ignacio Mini (Argentine).

(Un lieu de vie avec les maisons donnant sur la place centrale.....)

(.....les galeries couvertes qui entourent le cloître et les ateliers.....)

 
(.....les portes qui donnent sur les galeries et ouvrent vers le jardin)


(Au dessus de la porte principale, les symboles de la foi et de l'ordre des Jésuites)

(La maquette du musée fournit une reconstitution qui aide à se représenter les choses)

On médite sur ces constructions comme on le faisait déjà à cette époque (Voltaire enthousiaste, Diderot critique), comme on l'a fait lorsqu'elles sont devenues à la mode (Chateaubriand), comme on le fait aujourd'hui dans le tourisme programmé des sites incontournables du Patrimoine Universel de l'Humanité. 

On retient désormais que la langue guarani est langue officielle au Paraguay mais que les Guaranis et leurs modes de vie sont menacés d'extinction.

Apevénte, he'i Paraguài.                                  Hasta aqui nomas, dijo el Paraguay.
Topa teko vai, teko joja'y,                                Que se acabe el sofrimento,  la opresion,
tou katu ko'êmba.                                              que venga, pues, el amanecer.
(peinture de rue)
Il dit : Voici le Paraguay.
Que cesse la soufrance, l'oppression,
que vienne, enfin, l'aube.
(Modesto Escobar Aquino)

Entre ces visites de ruines, on fait une petite excursion à Bella Vista ; des immigrés d'origine allemande se sont concentrés dans trois "colonies unies" où ils maintiennent leurs racines anciennes. 


On y visite la Pararito SA, une entreprise de culture et production de Yerba Mate. Intéressant et rodé sur le plan marketing ; on repart avec ses petits cadeaux... voyons !


  

Et le charme français joue une nouvelle fois... à moins que ce ne soient les motos !!! les aventuriers ont failli emmener avec eux la guide Lorena et la réceptionniste de la Lauro Raatz Parajito SA Yerba Mate

Yo volvere 
a buscar otra vez
tu antiguo fuego
y tu sal nuevo.
(peinture de rue)
Je reviens
chercher une fois encore
ton ancienne flamme
et ton sel nouveau.
(Suzy Delgado)

La route nous appelle de nouveau.
La pause sera courte dans l'hospedaje El Descanso (quel joli nom !) du village de San Ignacio qui s'est construit autour du site des ruines de la mission jésuite avec ses rues toutes perpendiculaires et parallèles, la plupart non revêtues, et donc soit pavées sommairement, soit en terre.

Soir au calme, loin, tellement loin de la frénésie des grandes villes. C'est bien...... aussi.

4 commentaires:

  1. On ne peut lire votre reportage sans songer au film "Mission" de Roland Joffé. Je pensais que tout avait été détruit, c'est donc une belle surprise de constater qu'il reste des vestiges impressionnants de ces "réductions".

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  2. Après quelques jours chargés (on travaille, nous) Je replonge dans votre voyage ,quel grand intérêt à vous suivre , à découvrir vos photos, à voyager avec vous dans des pays que j'aurai même pas imaginé découvrir un jour!!!!!Que hablas mas veces en Espagnol,porque me gusta mucho su viaje en América....Je vois que mon "gris/gris vous accompagne et résout les petits problèmes,chute à 30 à l'heure, mal aux côtes etc....Bien !Désolé J Marc, Nantes a encore perdu et est 17è!!!!!!!!
    Continuez à me faire rêver.......
    Buena suerte, compagneros
    Abrazo,
    Patricio

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  3. Je m'étais trop tôt interrogé (Iguaçu) sur les reste des Missions jésuites en pays guarani...
    Vous avez l'air de critiquer un peu par la bande la mise en valeur proprette et internationalisée de ces vestiges façon charte Unesco et patrimoine mondial de l'humanité.... Mais, je suis très content d'avoir fait le détour avec vous à Jesus de Tavarengue, San Ignacio Mini etc !!!!

    à part çà, la journée de moto sous la pluie, et la photo qui en témoigne, montrent un Jean-Marc les yeux clos... Manque de sommeil, ou grosse fatigue d'une concentration de tous les instants ??
    d'ailleurs, le poids des engins ne se fait-il pas trop sentir (pour vos carcasses Dubranna, certes gainées hors pair, mais tout de même !)au bout de 2 mois de prérégrinations au long cours ?!!

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    1. Avec bien du retard, retour sur un élément de ton commentaire, JB. Il n'y a aucune critique de la mise en valeur proprette, internationalisée, façon UNESCO, mais très claire désapprobation du commerce avilissant qu'on y installe alentours. "Les marchands du Temple" dit-on quelque part.

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